Le débat sur la réforme des retraites révèle un nouvelles fois les limites du fonctionnement actuel de l’état providence en France, et la nécessité de réfléchir au revenu de base.

Article initialement publié sur AgoraVox

L’actuelle réforme des retraites suscite des oppositions et des interrogations sur son bien fondé. Est-ce que cette réforme ne va pas amplifier les problèmes au lieu de les résoudre ? Dans un contexte où l’économie est en panne de croissance, ne vaut-il pas mieux s’orienter vers une formule qui propose un changement fondamental de la société ? En s’appuyant sur l’aspect qualitatif des potentiels humains plutôt que de continuer dans des mesurettes anxiogènes qui créent de la pauvreté et de la précarité ?

Est-ce que ça ne serait pas judicieux de profiter des crises structurelles de l’économie pour mettre en place cette mesure ?

Actuellement, nous nous trouvons dans une double problématique contradictoire : Nous avons à la fois de plus en plus de mal à financer les retraites mais aussi à accéder à un plein emploi. Ce qui provoque un paradoxe.

La solution actuelle au problème des retraites est à la fois l’allonger le temps de cotisation mais aussi de retarder le départ de la vie active. On est ainsi passé de moins de 37 ans de cotisation à plus de 43 ans (réforme en cours). Et de 60 à 67 ans pour ceux qui n’auront pas pu cotiser pleinement.

Nous aurons donc de plus en plus de seniors sur le marché du travail tout en sachant que c’est la tranche d’âge la plus fragile et la plus sujette au chômage. En gros, nous avons de la difficulté avec l’emploi des plus de 50 ans et nous allons en rajouter avec les plus de 60 ans.

Un taux de 1,5% minimum par an de croissance économique est nécessaire pour absorber les travailleurs victimes des gains de productivités créés par les entreprises grâce à l’automatisation et à l’optimisation des tâches. Ce taux est désormais inatteignable. Les plus optimistes parient sur une croissance de 0,7% pour les 20 prochaines années. Il faudrait en plus que l’économie absorbe tout une classe d’âge entre 60 et 67 ans ?!?

Double peine pour les précaires

Tout en sachant que si ils ne travaillent pas, ils ne cotisent pas. Ce qui ne va donc pas arranger la situations des caisses de retraites, mais va créer pour les intéressés une double peine : une précarité qui va s’ajouter à leur précarité. En effet, puisque ne cotisant pas ou peu, ils partiront plus tard à la retraite, souvent avec un revenu minimum, ce qui créera une nouvelle classe de pauvre : les seniors. Les inégalités s’accentueront.

Dans le schéma du travail salarié n’est pas pris en compte l’activité bénévole, sous médiatisée et dévalorisée. Pourtant de nombreuses activités bénévoles sont utiles, voire indispensables au bon fonctionnement de notre société. Mais dans le même temps, de nombreuses activités salariés ne sont pas utiles à la société comme le relève l’anthropologue David Graeber dans son article sur les « bullshit jobs » dont nous avons publié une traduction sur ce site.

Les retraités en bonne santé se sont littéralement engouffrés dans l’associatif et le bénévolat. Beaucoup de personnes commencent ainsi leur « véritable vie » d’après leur dire, à partir de la retraite car leurs revenus ne sont plus indexés à leurs activités. Les retraités actifs sont devenus une véritable force vive de la société.

Une autre voie que celle de créer un appauvrissement de l’activité par l’allongement des cotisations et le recul des départs à la retraite est possible : C’est le revenu universel de base.

La mise en place de ce revenu permettrait à la fois de résoudre le problème des retraites par un revenu moins cher à financer et plus égalitaire, mais aussi de résoudre le plein emploi qui coute chaque année à l’état des dizaines de milliards d’euro sans améliorer les conditions de vie en général.

La mise en place du revenu de base permettrait aussi de supprimer le clivage inter-générationnel entre actifs et retraités. Il permettrait ainsi de redistribuer activité et revenu de manière plus équitable en prenant compte la préservation des écosystèmes et l’amélioration du cadre de vie.

Les modalités de financement du revenu de base sont multiples. Elles ont été étudiées par différents économistes de droite comme de gauche. La campagne actuelle pour l’initiative citoyenne européenne pour le revenu de base est donc aussi l’occasion pour les citoyens d’amener une solution aux financement retraites.


Crédit photo : Paternité Stan Jourdan