« Le tour de passe-passe de France Travail pour intégrer les bénéficiaires du RSA dans les chiffres du chômage. »

C’est écrit dans le Figaro, dans un article signé par Pierre-Louis Thomas le 14/02/2025. *

Mensonges et camouflages ne durent qu’un temps.

La bouillante réalité camouflée, tôt ou tard fend la croûte des hypocrisies réitérées, des privilèges coalisés.

Les libéraux qui nous gouvernent et nous bernent triturent et manipulent les chiffres du chômage. A dessein : leurs privilèges exigent la dissimulation.

Histoire ancienne actualisée par la tentative d’intégrer près de 2 millions d’allocataires du rsa dans les hospices disciplinaires de France travail.

Saisissons loupe et calculette pour y voir clair, y voir vrai.

Les allocataires du RSA, chaque mois sustentés de 647,70 euros dès la 1er avril prochain sont au nombre proche de 2 millions (1,9).

Les chômeurs « classiques » – moins de la moitié sont indemnisés pour un montant moyen de 1000 euros mensuels durant une durée fortement décroissante… – sont toutes catégories additionnées (chômeurs à plein temps et précaires insécurisés) au nombre de 6 millions (5,8, catégorie de A à E, nous rencontrerons plus bas le misérables en F et G), que l’on nous fasse grâce des unités précises.

Nous comptons dans l’hexagone 30 millions d’actifs – les chômeurs en font partie : ils sont des actifs inoccupés – nous sommes donc déjà à un chômage de 20 %.

Le chiffre périodiquement médiatisé est celui des chômeurs de la catégorie A, 3,130 millions au 4ième trimestre 24.

Continuons les additions, le total donne la dimension du mensonge.

Aux 6 millions des chômeurs « normaux » s’ajoutent les presque 2 millions (1,9) des nantis du RSA.

Et, douloureuse arithmétique : 6 + 2 = 8. (Plus exactement : 6+ 1,9… ne pinaillons pas, la réalité ne se dénombre pas à l’unité près).

Les chômeurs, proliférantes cohortes d’assistés sont donc au nombre de 32,6 % de la population active (30 millions en comptant les ubérisés déclarés occupés à vous livrer de tièdes pizzas…). Ne nous attardons pas sur les « sans papiers » qui livrent au noir, même le jour… Invisibles dans les chiffres officiels.

Pour ajouter aux beautés de la forfaiture mathématique, on ajoute aux catégories de A à E des chômeurs des F en difficultés et des G irrécupérables.

Dévalorisation de la valeur travail

La France compte 68 millions d’habitants, une population active de 30 millions (environ), la population active occupée est de l’ordre de 22 millions (cf. estimations plus haut).

En raisonnant en ordre de grandeurs, moins d’un français sur trois est occupé dans les trois secteurs de l’économie (primaire, secondaire, tertiaire). Plus de 60 % s’activent dans le tertiaire.

Le repérage précis des « boulots à la con », « bullshit jobs » dans la langue de David Graeber n’est pas aisé.

Nonobstant, à partir des nombreux témoignages des condamnés à faire semblant (ce qui peut être épuisant à vivre), que reste-t-il du travail réellement productif, utile ?

Un inventaire précis – déjà entamé dans le livre de Graeber – serait présentement fastidieux. Evitons la besogneuse dissertation.

Deux questions seulement, rapidement.

. Quelle est la valeur de ces occupations dont la fonction est essentiellement disciplinaire ? Il s’agit de faire perdurer la morale du travail. Le loisir, c’est l’espace de tous les vices selon Voltaire et ses thuriféraires contemporains.

. Quant à la valeur économique du travail, le temps passé à brasser des courants d’air demeure-t-il la substance de la valeur ?

Les économistes et les marxistes aussi, ne doivent-ils actualiser leurs copies ?

Sans doute nous faut-il quitter les rives bétonnées de la logique comptable capitaliste pour, sur l’autre berge, imaginer une société de loisirs enrichissants dont toutes et chacun pourrait bénéficier pour autant que le travail-emploi soit mis à la place qu’il devrait occuper : marginale, sur les bords de la vraie vie.

Lucides les libéraux, drapés dans une liberté factice, déjà sentent et savent que le travail (leur travail, le salariat) est agonisant. Par subterfuges, et « réalisme », de fait soumission au réel qui les enrichit, ils savent, les nantis et fort bien dotés, qu’il faut mentir ou périr.

Il nous appartient d’accélérer (trop) la lente agonie du travail.

Un revenu de base suffisant est une condition nécessaire – non suffisante – pour un droit au loisir, qui n’est pas paresse, mais créativité pour vivre (beaucoup) mieux en travaillant (beaucoup) moins. Les boulots de merde ne sont pas inévitables. Un revenu décent pour avoir les moyens de les refuser, est une exigence réaliste. Un revenu comme incitation à la réduction et partage du temps de travail.

Un inventaire des productions réellement utiles, la répartition plus égalitaire des efforts de production, nécessaires encore est une tâche collective à entreprendre urgemment.

Pour chauffer les esprits, énerver les neurones, une belle citation d’un auteur d’envergure : Bertrand Russel, dans Eloge de l’oisiveté. (1932).

« Dans un monde où personne n’est contraint de travailler plus de quatre heures par jour, les hommes et les femmes ordinaires, deviendront plus enclins à la bienveillance qu’à la persécution et à la suspicion.

[…]

La bonté est, de toutes les qualités morales, celle dont le monde à le plus besoin, or la bonté est le produit de l’aisance et de la sécurité, non d’une vie de galériens.

Les méthodes de productions modernes nous ont donné la possibilité de permettre à tous de vivre dans l’aisance et la sécurité.

Nous avons choisi, à la place, le surmenage pour les uns et la misère pour les autres : en cela nous nous sommes montrés bien bêtes, mais il n’y a pas de raison pour persévérer dans notre bêtise indéfiniment. »

Il nous faut changer d’instrument de mesure, la valeur travail ne fait plus l’affaire.

Ce « papier » est largement « fabriqué » (chiffres) à partir – et en partie – de l’article du Figaro ( 13/02/2025) sur lequel Valérie Porcaro a eu l’heureuse initiative d’attirer notre attention. Remerciements.