Note de la rédaction : cet article est la tribune d’opinion d’un adhérent vivant avec un minima social souhaitant rester anonyme, et ne représente pas l’avis officiel du MFRB.
Lutter contre la pauvreté des personnes seules avec 500€… Vous êtes sérieux ?
Valérie Petit vient de lancer sa consultation sur le revenu universel et annonce son projet de socle citoyen à 500€ par mois. Rien que ça !
Ce socle constituerait une avancée majeure en termes d’inconditionnalité, d’universalité, d’individualité puisque versé sans conditions, à tout le monde et individuellement (dans un couple chacun en bénéficierait) ainsi qu’une ouverture de droits aux jeunes de 18 à 25 ans.
J’ai suivi la première consultation à distance et Valérie Petit argumente son projet comme devant essentiellement lutter contre la pauvreté. Cela est probablement bénéfique pour les familles ou parents isolés, mais ne procure aucun gain financier aux personnes seules bénéficiant déjà d’un minima social, qui on le sait sont parmi les plus pauvres.
Lutter contre la pauvreté ou partager avec les pauvres ?
En France, neuf millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté avec moins de 1000 euros par mois, selon l'Insee. Une large part (2.300.000 personnes) vit même avec moins de 670 euros par mois.
Et plus éclairant, selon la DREES (Direction de la recherche, des études de l'évaluation et des statistiques), les effectifs de personnes seules au RSA sont respectivement en 2019 16,5% des femmes allocataires soit 358.100 femmes seules, et 31,8% des hommes allocataires soit 688.300 hommes seuls. Donc plus d’un million de personnes seules qui tentent de vivre avec plus ou moins 500€…
Et je ne compte même pas les allocataires ASS, pour lesquels un remplacement par le socle citoyen occasionne une perte mensuelle sèche de 13,73€ (-2,75%).
Alors certes plus d’un million de personnes concernées seront sûrement soulagées de ne plus devoir « prouver qu’elles sont pauvres », ni d’avoir à justifier l’aide d’une grand-mère de 100 euros pour laquelle on leur coupe le RSA dans certaines villes. Elles dormiront peut-être mieux et auront une meilleure énergie.
Mais auront-elles pour autant les moyens financiers et donc le champ d’action pour se sortir de la pauvreté avec 500€ ? Laissez-moi en douter.
Qui peut le prétendre ? Peut-être simplement celles et ceux qui n’ont jamais eu à vivre seuls avec une telle somme en 2020 en France.
Car on ne peut évidemment pas théoriser avec succès une lutte contre la pauvreté sans l’avoir vécue intimement. Voilà peut-être la limite de cette proposition de socle citoyen : elle devrait se construire avec un conseil des personnes concernées, lorsqu’il s’agit de prétendre lutter contre la pauvreté. Ce qui permettrait de ne pas faire l’économie de “la suffisance", ce qu’ont bien compris les porteurs de l'initiative citoyenne européenne sur le sujet.
Alors, un socle citoyen de 500€ en France contre la pauvreté ?
Encore un petit effort chers politiques, économistes et théoriciens, 100 ou 200 euros de plus, et vous pourrez commencer à prétendre donner du choix à ces “pauvres” gens, qui sont seuls !
Pour conclure, un socle citoyen un peu étroit, oui mais...
Vous vous demandez peut-être alors si je défendrai une telle mesure ?
Et je vous réponds sans hésitation oui. Car je reconnais le besoin urgent d’établir une règle universelle, individuelle, qui enfin permettra de libérer la société d’un soi-disant "assistanat". Il sera temps alors de se pencher sur le montant du minimum social, avec l’esprit socialement apaisé.
Et puis au passage, changeons de langage : pourquoi “lutter contre la pauvreté” (comme si c’était une maladie) alors qu’on pourrait “partager avec les pauvres” ?
Et maintenant, camarades ?
Je lance un appel à vous les plus de 1 million de camarades du survivre avec 500€ : en attendant que ce socle citoyen soit éventuellement institutionnalisé, donnons de la voix en signant l’initiative citoyenne européenne pour un revenu de base inconditionnel et suffisant !
Que nous les moins visibles donnions un coup de tonnerre démocratique, pour leur rappeler que du fond de notre impossibilité à vivre, nous sommes pourtant toujours (sur)vivants et déterminés.
Un adhérent anonyme