Aujourd’hui à 15 heures, les députés commenceront l’examen de la loi sur la République numérique, dans le cadre de la procédure accélérée voulue par le gouvernement. Nous avons déjà évoqué l’amendement sur le revenu de base présenté par Delphine Batho et rejeté par la Commission des Lois. La députée socialiste a décidé de le présenter à nouveau en séance plénière cet après-midi. Deux autres amendements, au contenu similaire, seront également discutés. Le texte des trois amendements est le suivant :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 30 juin 2016, un rapport sur l’instauration d’un revenu de base à l’heure de la révolution numérique et des mutations qu’elle entraîne sur le travail. Ce rapport comprend une étude de faisabilité macro-économique, une étude d’impact comparative des différentes approches de cette proposition, ainsi qu’une analyse des expérimentations en cours, internationales et locales, d’un tel revenu de base.
Même texte. Mais l’exposé sommaire, qui résume la motivation des députés qui les soutiennent, est intéressant à lire.
Pour Delphine Batho, socialiste (amendement 552) :
« L’idée d’instaurer un revenu de base universel et inconditionnel fait son chemin.
La société s’en empare en raison des mutations rapides qu’entraine la révolution numérique sur le travail et la création de valeur.
La représentation nationale doit désormais se saisir de ce débat.
Différentes approches du revenu de base co-existent, qu’il s’agisse de rémunérer le travail « gratuit » et créateur de valeur que tout un chacun accompli au travers des outils numériques, de garantir à tous un revenu minimal d’existence, ou de refonder et simplifier tout ou partie des systèmes de prestations sociales.
Alors que le gouvernement prépare un projet de loi qui traitera des mutations du monde du travail à l’heure du numérique, le Conseil National du Numérique, dans un rapport présenté le 6 janvier, dans sa recommandation n°20, propose que soit lancée une expertise des différentes propositions et expérimentations autour du revenu de base, et conseille une méthode de réflexion.
L’examen du projet de loi pour une République numérique doit être l’occasion d’engager ce travail d’expertise et de réflexion. C’est le sens du présent amendement demandant au Gouvernement de présenter un rapport au parlement comprenant une étude de faisabilité macro-économique, une étude d’impact comparative des différentes approches de cette proposition ainsi qu’une analyse des expérimentations en cours, internationales et locales, d’un tel revenu de base ».
Pour Arnaud Leroy, également socialiste (amendement 154),
« Le revenu de base universel et sans condition est une idée qui a traversé les années et les frontières, aussi bien géographiques qu’idéologiques.
Aujourd’hui, avec l’existence d’un fort taux de chômage et les bouleversements apportés par le numérique, la question de l’organisation du travail se pose de nouveau. Elle nous incite à engager la réflexion sur la déconnection entre emploi et revenu afin de repenser la place de ces notions dans notre société et de tenir compte de l’utilité sociale de chaque activité.
En outre, l’évolution que nous connaissons actuellement vers l’autonomie de plus en plus grande des personnes conduit nécessairement à réfléchir à l’instauration d’une allocation individuelle même si le maintien de certains mécanismes de redistribution reste nécessaire.
Plusieurs pays européens se sont engagés dans cette réflexion, notamment la Finlande ou les Pays-Bas où dix-neuf communes vont expérimenter le revenu de base dès 2016.
En France, la proposition a été introduite dans le dernier rapport du Conseil National du Numérique qui recommande d’éclairer et d’expertiser les différents dispositifs et expérimentations autour de ce revenu d’existence (recommandation n°20).
Le rapport demandé par le présent amendement devra notamment étudier la faisabilité macro-économique ainsi que les conséquences en termes de redistribution du travail. Le Conseil National du Numérique livre pour cela une méthode pertinente qui pourra être suivie par les auteurs de ce rapport ».
Enfin, pour Frédéric Lefebvre, Sylvain Berrios, Arlette Grosskost, Patrice Martin-Lalande, Paul Salen, François Vannson, Michel Voisin (Républicains), Maurice Leroy et Jean-Paul Tuaiva (UDI) (amendement 511),
« Le mercredi 6 janvier 2016, le Conseil national du numérique a remis son rapport “Travail emploi numérique : les nouvelles trajectoires” à Myriam El Khomri, Ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du dialogue social.
Dans ce rapport, il promeut le revenu dit « de base ».
De même, le premier ministre finlandais, Juha Spila, souhaite mettre en place dans les prochains mois une allocation de base pour tous les citoyens du pays, sans distinction d’âge, de situation sociale ou de santé.
L’expérimentation devrait être réalisée dans un premier temps dans une région du pays fortement impactée par le chômage servant de laboratoire.
Ce revenu universel, versé sans contrepartie, a pour objectif de garantir à chaque citoyen les moyens de vivre modestement. Pour le gouvernement finlandais, il s’agit de lutter efficacement contre la pauvreté. Selon des hypothèses actuellement en discussion, ce revenu universel remplacerait alors toutes aides sociales en vigueur. En particulier, l’ensemble des aides au logement, aux chômeurs, aux étudiants ainsi que les pensions de retraite seraient supprimées.
Les citoyens qui souhaitent avoir un niveau de vie plus élevé pourront bien sûr compléter ce revenu de base en étant salariés, artisans ou entrepreneurs.
Le projet énoncé est soutenu majoritairement en Finlande où selon les premiers sondages, 79 % de la population approuve cette idée alors que la réforme est également bien reçue par 69 % des députés.
C’est pourquoi le présent amendement vise à permettre la fourniture au Parlement d’un rapport sur la nécessité de faire évoluer les aides sociales en France vers un revenu universel pour assurer à l’ensemble des citoyens un niveau minimal de ressources ».
Les débats seront retransmis sur la Chaîne Parlementaire. Nous publierons vers 15 heures le lien permettant de les suivre en direct.
Photo : Assemblée nationale – DR.