Le revenu universel est un sujet qui n’est pas nouveau mais qui a pris récemment de l’importance tandis qu’il est abordé par des figures politiques telles que Benoît Hamon ou encore Manuel Valls. Finalement, pour les salariés, qu’est-ce que cela pourrait changer à leur travail ?
1) Une suppression ou une meilleure rémunération des travaux les plus pénibles
A l’origine, l’idée est qu’en offrant à chacun un revenu de base, on permet aux citoyens d’être moins dépendant du travail et d’être plus autonome. Toucher, sans condition particulière, un montant suffisant pour subsister, c’est avoir cette préoccupation en moins et au final, avoir la liberté de faire un choix. Le choix notamment de pouvoir exercer le travail que l’on souhaite plutôt que d’être contraint de subir un travail pénible et/ou inintéressant du fait de la nécessité de toucher un revenu.
A terme, cela signifie que les travaux les plus pénibles devront être mieux rémunérés, sans quoi ils seront délaissés par les travailleurs ; ce qui entrainera peut-être la suppression de ces tâches. A la place, chacun pourra développer des projets personnels. Ce raisonnement reposant en partie sur le concept que, comme le soutient le sociologue Bernard Friot, toute activité est créatrice de richesse, il s’inscrit par ailleurs dans une préoccupation de bonheur au travail, qui est plus marquée chaque année, tandis que les burn-out, bore out et même désormais les brown-out (perte d’intérêt pour le travail due à l’absurdité quotidienne des tâches à accomplir) se multiplient.
2) Une mesure favorisant le plein emploi
On peut affirmer que le chômage est dû au manque d’offres d’emploi par rapport au nombre de personnes qui en cherche. Néanmoins, le problème se situe aussi à un autre niveau : beaucoup de postes sont à pourvoir mais, en raison des qualifications requises, sont inaccessibles pour toute une partie des demandeurs d’emploi. Or, selon le Mouvement Français pour un Revenu de Base, ce dernier permettrait de rendre possible la formation continue tout au long de la vie et donc, de développer les qualifications de nombre de travailleurs. Ce qui a terme devrait renforcer leur employabilité. C’est-à-dire, selon le Ministère français chargé de l’emploi, « la capacité d’évoluer de façon autonome à l’intérieur du marché du travail, de façon à réaliser, de manière durable, par l’emploi, le potentiel qu’on a en soi… ».
En effet, il n’est pas toujours évident de se former une fois dans la vie active. Le manque de temps est en cause et pour beaucoup et l’aspect financier l’emporte, bien que le Congé individuel de formation vise à résoudre ce problème. En parallèle, les chômeurs doivent avoir pour priorité absolue de retrouver du travail et si, dans ce but, il leur est parfois proposé des formations, ces dernières seraient sans doute mieux accueillies sans la pression de devoir toucher au plus vite un revenu.
Par ailleurs, la création d’un revenu de base aura certainement pour effet d’encourager certains travailleurs à passer à temps partiel. Ce qui entrainera logiquement davantage d’offres d’emplois et contribuera à diminuer le chômage.
3) Un projet qui comporte des risques
Le premier problème est que si l’Etat verse à tout le monde un revenu, cela signifie qu’en parallèle les salaires seront d’autant diminués. Ainsi, l’économiste Jean-Marie Harribey s’inquiète qu’il y ait là une possibilité de contourner le salaire minimum ou même de le supprimer.
De plus, la mise en place d’une telle aide nécessitera la révision, voir disparition d’autres aides. Ainsi, il ne faudrait pas, par exemple, que la mise en place d’un revenu de base se fasse au détriment de mesures favorisant un retour à l’emploi des plus pauvres.
Enfin, si le montant du revenu de base est trop faible, il ne permettra pas de lutter contre la pauvreté et d’aider les plus démunis à retourner dans la vie active. S’il est trop élevé, il risquera, au contraire, d’avoir pour effet d’entrainer une marginalisation des actifs qui ne verront plus d’intérêt à aller travailler.
Il faut savoir que selon une étude de l’INSEE, le seuil de pauvreté s’établit à 1 008 euros net mensuels. Un français sur sept vivait au-dessous en 2014 et peut être est-ce votre cas : calculer son salaire net.
Conclusion
Un revenu de base, c’est donc avant tout la liberté d’un choix, celui du travail que l’on veut faire mais aussi celui de se former si l’on en éprouve le besoin pour accéder à un emploi. C’est aussi une solution aux pathologies toujours plus nombreuses qui apparaissent à l’occasion du travail et placent la question du bonheur des salariés au centre des préoccupations. Mais le concept d’un revenu universel éveille aussi certaines craintes et il est encore difficile d’affirmer avec certitude que les conséquences espérées se réaliseront et que d’autres conséquences craintes ou imprévues, ne surviendront pas.
Pour aller plus loin : Benoît Hamon défend le revenu de base sur le plateau de Télématin.
Auteur : Timothé Bureau
Photo : CC Pixabay, TiBine.
C’est bien sûr le point 3 pourrait se faire toute la nouvelle lutte…
Car si le revenu universel / le revenu de base devenait pour les employeurs une possibilité de s’exonérer d’autant sur le montant des salaires, alors il n’aurait servi qu’ à “maintenir des pauvres” (voir en ajouter avec les économies humaines aux impôts et aux allocations familiales) dans leurs conditions quasi inchangées (même si amélioré par le socle), et (encore) à la faveur d’un profit supérieur pour le capital… Et à moins de “gains” miraculeux en retour pour l’emploi, il ne se passerait donc rien ou presque quant aux voeux de bons nombres d’entre ceux qui auraient espérés pouvoir réduire comme ils le voudraient leur temps de travail pour le partager.
En fait, potentiellement, et dans ce cas-là, le revenu universel / le revenu de base deviendrait aussi et surtout un CICE universel !
Si le capital(isme) tend vers le pousser dans ce sens-là, alors il paraitra a ceux qui se sentiront dupés par l’outil démocratique (grosso modo surtout les travailleurs à petits revenus) (et à moins qu’ils ne se sentent pas dupés ce qui pourrait être possible) il apparaitra que la nouvelle sécurité sociale, l’avancée sociale majeure promise – attendue et (tant) espérée ! – qu’elle ne l’aura pas si nettement été pour eux. Hormis par le gain important sur l’inconditionnalité individuelle à vie souhaitable et toujours potentiellement “très confortable” sur une partie (mineure ou majeure) de leurs revenus…
Mais c’est bien la promesse du choix de pouvoir réduire son temps de travail pour le partager qui en prendrait un sacré coup !
Ceux qui s’en sentiraient trahis, qu’ils soient les “éternels floués du capital” ou les nouveaux, malgré ce socle bien plus démocratique pourraient se radicaliser d’autant.
Et la seule alternative crédible possible pour réorienter la promesse originelle potentiellement violée et trahie pourrait être celle issue du projet de société défendu par Bernard Friot et son salaire à vie (avec plafond et échelle de 1 à 6). Avec cette fois l’abolition du capitalisme, du crédit et de la propriété lucrative à la faveur – entre autres – de la collectivisation des moyens de production et de l’investissement !
Dans tous les cas, et quoiqu’il advienne, la condition humaine aura rendez-vous avec son histoire.
Bonjour,
Je ne suis pas du tout d’accord avec le point 3).
Absolument rien ne dit que les salaires versé par les employeurs seront diminué du montant du revenu de base lors de son instauration.
Et pour toutes sortes de raisons :
1) Le SMIC ne disparaitra pas pour autant.
2) Beaucoup de travailleur ont un contrat et CDI déjà signé et ils ne vont pas accepté de renégocier leur salaire a la baisse facilement.
3) Si l’employeur met la pression avec le revenu de base les employer pourront tenir un piquet de grève bien plus longtemps.
Il me semble bien plus raisonnable de pensé que ce ne soit pas les salaires qui bouges mais les impôts puisque avec salaire + revenu de base les salarier auront des revenus totaux plus importants.
Enfin même dans le cas d’un montant plus faible que ce que nous pourrions espérer, s’il n’est pas accompagné par la suppression d’aides que ce montant ne compense pas, il permettra malgré tout de lutter contre la pauvreté. Même si ce n’est pas autant que nous pourrions le souhaiter, ce serais toujours ça de gagné.