Le 15 février, le Premier Ministre Édouard Philippe s’est prononcé favorable à la mise en place de contreparties aux aides sociales. Cette déclaration est jugée méprisante et dangereuse par le Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB).
En pleine crise sociale, cristallisée par le mouvement des gilets jaunes, le Premier Ministre a fait réémerger l’idée d’un conditionnement des aides sociales à du travail bénévole. En qualifiant lui-même ces activités « d’intérêt général », ce qui évoque par ailleurs les peines infligées aux délinquant·e·s, on pourrait y voir une volonté de criminaliser les personnes les plus précaires. Mais quel serait donc leur crime ?
Édouard Philippe a ainsi relancé le débat ouvert en 2016 par le Conseil départemental du Haut-Rhin, qui avait proposé le conditionnement du RSA à sept heures de bénévolat par semaine. Une initiative qui avait été retoquée par le Tribunal administratif de Strasbourg et la Cour administrative d’appel de Nancy(1), avant que le Conseil d’État ne casse cette décision en juin 2018.
Rappelons que sur les six millions de personnes actuellement au chômage, il n’existe que 600 000 offres d’emplois à pourvoir. Rappelons également que le gouvernement a mis fin aux contrats aidés, qui bénéficiaient majoritairement aux associations. La feuille de paye revient par conséquent à un sésame auquel peu auront de toutes manières droit. Ceci alors même que l’article 11 du préambule de la Constitution de 1946 indique que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. »
Conditionner le dernier filet de sécurité sociale est non seulement anticonstitutionnel, mais aussi immoral. Nous avons déjà créé une société à deux vitesses, par le mythe de l’assistanat et la stigmatisation des personnes sans emploi. Il est indécent que notre société accepte d’abandonner certain·e·s de ses citoyen·ne·s en les laissant tomber sous le seuil de pauvreté. Rien ne légitime cette situation.
Un revenu de base permettrait de mettre fin à cette stigmatisation des plus précaires, à travers la garantie d’un revenu considéré avant tout comme un droit d’exister et de vivre dans la dignité. Il s’agit d’un revenu versé automatiquement à l’ensemble de la population et sans contrepartie, contrairement au « revenu universel d’activité » annoncé par un détour sémantique d’Emmanuel Macron en septembre 2018. L’inconditionnalité et le caractère cumulable d’un véritable revenu universel permettraient par ailleurs le retour à l’emploi sans craindre de perdre une partie de ses aides sociales. Conditionner les aides sociales à des activités bénévoles reviendrait à du travail forcé.
Nous demandons le versement automatique des aides sociales et leur inconditionnalité
Si nous sommes bien conscient·e·s que le gouvernement actuel n’est pas prêt à mettre en place dès demain un revenu de base universel, nous estimons qu’une première étape pour améliorer les conditions de vie de l’ensemble de la population serait le versement automatique des aides et la suppression de leur conditionnalité.
Nous appelons le gouvernement à être ambitieux dans ses mesures de lutte contre la pauvreté. Nous avons besoin d’une société de confiance et d’accompagnement, et non d’une société de contrôle et de sanction.
Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB)
Contact presse :
MFRB : camillelambert@revenudebase.info / 06 20 50 08 72
(1)TA de Strasbourg, 5 octobre 2016, n° 1601891 ; CAA de Nancy, 18 avril 2017, n°s 16NC02674, 16NC02675